Homélie du 19ème dimanche du Temps ordinaire
Abbé Jean Compazieu | 2 août 2020“N’ayez pas peur.”
Textes bibliques : Lire
Les textes bibliques que nous venons d’écouter nous invitent à faire un pas de plus sur le chemin de la conversion. C’est ce qui apparaît pour Élie dans le Livre des Rois. Il vient de combattre l’idolâtrie avec beaucoup d’ardeur ; Alors sa vie se trouve en danger. Après 40 jours et 40 nuits de marche, il arrive sur la montagne de l’Horeb (le Sinaï). Il lui a fallu toute cette longue marche pour s’apercevoir qu’il n’était pas sur le bon chemin et que, peut-être, il s’était trompé de Dieu. Comme ses adversaires, il s’imaginait un Dieu de puissance.
Mais Dieu ne l’abandonne pas : il l’invite à se tenir là et à attendre son passage ; il y eut un ouragan, un tremblement de terre, puis un feu. Mais le Seigneur n’était ni dans l’un ni dans l’autre. Après cela, ce fut le “murmure d’une brise légère”. Elie comprend alors que le vrai Dieu n’est pas celui de la violence. Ce n’est pas en massacrant les “infidèles” qu’on sauvera l’honneur du vrai Dieu. Plus tard, Jésus nous révèlera un Dieu qui n’est qu’amour et miséricorde. Il ne sait pas être autre chose. C’est en aimant que nous dirons quelque chose du vrai Dieu.
L’apôtre Paul s’était lui aussi trompé sur Dieu. Dans un premier temps, il a violemment persécuté les chrétiens. Lui aussi croyait défendre l’honneur de Dieu. Mais un jour, il a rencontré Jésus sur le chemin de Damas. Pour lui, cela a été le point de départ d’une véritable conversion. Dans un premier temps, il rappelle aux chrétiens ce qu’ils doivent aux juifs qui leur ont donné Jésus : “C’est de leur race que le Christ est né. Les juifs appartiennent au projet divin”. Paul nous fait part de sa douleur face à l’incrédulité de ses frères de sang. La majorité des juifs suivent les pharisiens. Ils n’acceptent pas que le privilège du peuple élu soit étendu à tous les païens qui ont mis leur foi au Christ.
L’évangile qui vient d’être lu fait suite au récit de la multiplication des pains. Jésus vient de nourrir une foule affamée. Le soir venu, il se retire sur la montagne pour prier. Il veut échapper à tous ces gens qui cherchent à faire de lui leur roi. Plus tard, il précisera que sa royauté n’est pas de ce monde. Sa mission première est de révéler aux hommes les secrets du Père. Nous pouvons imaginer sa déception et sa lassitude devant tous ces gens si lents à croire.
Pendant qu’il est sur la montagne en cœur à cœur avec le Père, les disciples sont sur la barque. Ils avancent péniblement vers “l’autre rive”. Cette barque de Pierre est devenue le symbole de l’Église. Les vagues et les vents contraires évoquent le monde. Quand saint Matthieu écrit son Évangile, il s’adresse à des chrétiens persécutés. C’est encore plus vrai aujourd’hui. En Afrique et ailleurs, les chrétiens persécutés sont bien plus nombreux qu’aux premiers siècles. On veut les obliger à renier leur foi et leur imposer une religion qui n’est pas celle du Christ.
Et puis, il y a bien d’autres tempêtes que nous affrontons un jour ou l’autre : celle des événements difficiles et des horizons bouchés, celle du Covid 19 qui a causé beaucoup de dégâts, celle de la précarité et de l’exclusion. Nous vivons dans un monde qui souffre de la guerre, de la violence et de l’exclusion. Les pauvres y deviennent de plus en plus pauvres et de plus en plus nombreux. Si nous voulons rester fidèles à l’Évangile du Christ, il nous faut lutter régulièrement contre les vents contraires.
Mais voilà qu’en ce jour, nous entendons une bonne nouvelle : l’Évangile nous montre le Christ qui marche sur les eaux. La mer déchainée est le symbole des puissances du mal. Jésus qui marche sur l’eau nous montre que ce mal n’a pas de prise sur lui. Avant même qu’on l’appelle, il s’avance vers les siens. Son empressement à sauver ceux qu’il aime mérite d’être souligné. Il est “Emmanuel”, Dieu avec nous. Il nous assure de sa présence “tous les jours, jusqu’à la fin du monde. Au cours de cette traversée, les disciples ne reconnaissent pas Jésus. Pour le reconnaître, il faut le regard de la foi. Le plus important c’est que le Christ vient à nous, même si nous n’implorons pas sa venue. Quand la tempête fait rage, il se fait proche. Il reste présent même quand nous nous éloignons ou quand nous l’oublions.
En lisant cet Évangile, comment ne pas penser à la Vierge Marie ? Elle en a connu des tempêtes. Dès le début, elle a dû fuir en Égypte pour protéger son enfant. Elle a beaucoup souffert de l’incompréhension de son peuple qui refusait le message de Jésus. Elle a suivi son fils jusqu’au pied de la croix. Aujourd’hui, elle est toujours là pour nous renvoyer au Christ. Comme à Cana, elle nous invite à faire tout ce qu’il nous dira. C’est ainsi qu’elle nous montre le chemin de la sainteté.
Avec Marie, nous nous tournons vers le Christ. Quand tout va mal, n’hésitons pas à crier : “Seigneur, sauve-moi.” Et le Christ est toujours là pour tendre la main à celui qui l’implore avec confiance. Il est toujours disposé à sauver du naufrage celui qui l’implore. Conscients de notre fragilité et de nos faiblesses, nous le supplions : “Je crois, Seigneur, mais augmente ma foi”. (Luc 17, 5)
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Sources : Revues liturgiques – L’Intelligence des Écritures (MN Thabut) – Paroles pour la route Année A (J.Y Garneau) – Reste avec nous quand vient le soir (Laurette Lepage)
« La barque était déjà à une bonne distance de la terre, elle était battue par les vagues, car le vent était contraire. »
‘La barque battue par les vagues…’ Une barque naviguant sur les eaux du monde, tantôt par temps calme et sous un soleil radieux, tantôt en pleine tourmente et battue par les événements qui nous dépassent, ‘car le vent était contraire’ ! C’est l’image même de notre vie ! Combien tempêtes avons-nous dû affronter ? Combien de fois, chacun de nous a vu son horizon s’assombrir ? Des échecs, des souffrances, des imprévus… Et aussi des moments de doute sur notre chemin de foi à la suite du Christ ! Des hauts et des bas au rythme du temps et des événements sur lesquels nous n’avons aucune emprise ! Nous passons par des eaux profondes dans bien des moments de notre existence. C’est notre lot commun à tous.
Des difficultés et des contrariétés de toutes sortes, on en a toujours dans la vie. Mais face aux contretemps, chacun a sa façon de réagir selon son caractère et ses habitudes. On peut pratiquer la politique de l’autruche en évitant soigneusement d’assumer les difficultés qui se présentent. On peut jouer ‘à la cigale’ en vivant au jour le jour sans rien prévoir. Mais rares sont ceux qui pensent à remettre tous les soucis entre les mains de Dieu en se confiant à Lui. Dans les épisodes éprouvants de notre vie, Jésus nous invite à aborder nos tribulations avec plus de sérénité. Il nous encourage à affronter le vent et la tempête sans crainte, car à côté de nous, c’est Lui-même qui nous soutiendra. Il ne cesse de nous dire aujourd’hui encore : ‘ Confiance ! N’aie pas peur !’ Dans nos moments de doute et de désespoir, n’hésitons pas à crier secours comme Pierre, quand la frayeur le saisit. « Seigneur, sauve-moi ! » Dieu se révélera à nous de mille manières, à travers des événements ou des personnes qui nous aideront à surmonter l’épreuve. Mais des fois, il nous accorde tout simplement la sérénité dans l’âme pour supporter l’adversité. Invitons-Le dans la barque de notre vie. Sa présence nous redonnera force et courage ! Avec Lui à bord, les vents se calmeront.
Faut-il en conclure alors qu’il n’y a qu’à laisser Dieu agir à notre place ? Est-ce une invitation à la passivité et à rester là sans rien faire ? Certainement pas ! Jésus nous met tout d’abord en garde contre une attitude trop humaine à se décourager et à douter de nous-mêmes. Il nous engage à ‘se jeter à l’eau’ pour affronter nous-mêmes nos difficultés. Car des fois, en regardant de plus près, tant de tracas ne sont pas justifiés. Les soucis démesurés traduisent peut-être une attitude de manque de confiance en soi. Dieu nous a confié des capacités de discernement, une volonté d’agir, et il attend que nous nous en servions. Dans la situation particulière Pierre, c’est l’enthousiasme qui le propulse vers Jésus, mais l’angoisse le rattrape tout d’un coup. Une fois au milieu des vagues, il est saisi par le doute. Jésus l’a gentiment repris : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » Cette remarque adressée à son disciple n’est certainement pas un reproche, mais Jésus a voulu tout simplement le rappeler que sa foi en Lui n’est pas encore assez solide. Il sait pertinemment que Pierre va Le renier trois fois dans les moments cruciaux !
Cet épisode évangélique nous donne aussi une belle leçon de solidarité. La main tendue de Jésus à Pierre nous rappelle que nous sommes tous solidaires les uns des autres. Tendons-nous fraternellement la main. Apportons notre soutien à ceux qui en ont besoin. N’oublions pas que sur le chemin de la vie, avoir quelqu’un avec qui partager les émotions, les soucis… peut aider chacun de nous à surmonter nos difficultés et à trouver nos propres solutions. Nous avons besoin de nous épauler les uns les autres. L’entraide est une source d’énergie vitale qui nous encourage tous à poursuivre ensemble notre chemin vers le bonheur, vers Dieu ! « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » (Jn 13:34) nous exhorte Jésus !
Nguyễn Thế Cường Jacques
J’ai appris beaucoup de choses dans ton homélie père Jean et j’ai Lu soigneusement tes écrits Jacques’
Bonjour Jean,
Ce n’est pas pour ajouter un élément à vos commentaires que j’ai toujours lus et appréciés, mais pour vous inviter à ne pas tomber dans le piège des exemples faciles comme celui que je découvre dans vos commentaires de ce 19 ème dimanche du temps ordinaire A. Vous écrivez, je cite : ” En Afrique et ailleurs, les chrétiens persécutés sont bien plus nombreux qu’aux premiers siècles”. J’en retiens surtout cette allusion à l’Afrique qui me paraît machinale et gratuite! Je ne nie pas qu’il puisse exister quelque part au Nigeria ou en Egypte quelques poches de tension entre communautés chrétiennes et autres obédiences religieuses; qui débouchent sporadiquement à des affrontements meurtriers! nous devons reconnaître franchement qu’ en matière de cohabitation harmonieuse et pacifique entre différentes religions, l’Afrique que vous mettez en vedette devait plutôt servir de paradigme. Prenez le temps de visiter les pays comme le Niger, le Sénégal, le Kenya, la Côte d’Ivoire, le Congo et j’en passe, vous conviendrez qu’il fallait plutôt épingler l’Asie, l’Europe, avec les pays comme le Pakistan, L’Inde, la Russie, la Turquie où l’on assiste à des persécutions des chrétiens parfois officielles et intentionnellement téléguidées! Il se fait que pour l’Afrique les discours qui passent sont ceux qui la dépeignent en traits négatifs…
Merci pour vos commentaires